La variole du singe (ou orthopoxvirose simienne ou Monkeypox) est une zoonose due à un virus du même genre orthopoxvirus que celui de la variole humaine.
L’émergence récente de nouveaux cas en Europe et en Amérique va-t-elle nous conduire vers une nouvelle pandémie ?
L’orthopoxvirus impliqué dans cette maladie a été découvert en 1958, isolé à partir de lésions cutanées survenues chez des singes en captivité, essentiellement des macaques. Les singes ne constituent pourtant pas le réservoir du virus.
Une zoonose est une maladie ou infection qui se transmet à l’être humain par des animaux vertébrés, et vice-versa. Les agents pathogènes en cause peuvent être des virus, des bactéries, des parasites (protozoaires, cestodes, trématodes, nématodes), des champignons microscopiques ou des agents non conventionnels comme le prion. La transmission de ces maladies se fait soit directement, lors d’un contact entre un animal et un être humain, soit indirectement par voie alimentaire ou par l’intermédiaire d’un vecteur (insecte, arachnides…).
La variole du singe est due à un virus de la famille des poxoviridés, du même genre orthopoxvirus que celui de la variole humaine (une famille de virus englobe des genres qui ont des gènes et traits communs).
D’après l’Organisation mondiale de la santé animale :
Les zoonoses affecteraient chaque année dans le monde 2,4 milliards d’humains et en feraient mourir 2,2 millions.
La variole du singe sévit sporadiquement, principalement dans certaines régions situées à proximité des forêts tropicales humides de l’Afrique centrale et de l’Afrique de l’Ouest.
Deux clades principaux sont connus, celui de l’Afrique de l’Ouest et celui d’Afrique Centrale (bassin du Congo). Un clade regroupe un ancêtre commun et l’ensemble de ses descendants. La ligne de crête séparant les deux clades de l’orthopoxvirus passe au Cameroun, pays où ces deux derniers sont retrouvés en même temps.
Le réservoir du virus n’est à ce jour pas connu, mais semble être représenté par les rongeurs, pangolins et écureuils des forêts tropicales humides d’Afrique centrale et de l’Ouest. Il n’y a habituellement pas d’animaux réservoirs présents en Europe.
Les premiers cas humains de variole du singe ont été décrits en 1970 en République Démocratique du Congo (Ex Zaïre). C’est avec l’éradication de la variole humaine en 1980 et l’arrêt de la vaccination antivariolique qui a suivi, que l’orthopoxvirus a émergé comme le virus le plus important de ce genre.
En 2003, pour la première fois en dehors du continent africain, une épidémie est survenue aux États-Unis, importée depuis le Ghana par plusieurs espèces de rongeurs sauvages, dont les rats de Gambie. Ces derniers auraient contaminé une fois sur le sol américain des chiens de prairies dans des animaleries, vendus ensuite comme animaux de compagnie, eux-mêmes à l’origine de l’épidémie humaine.
Virions du Monkeypox isolés sur des chiens de prairie atteints de variole du singe aux USA en 2003. Vue en microscopie électronique
Le vendredi 6 mai 2022, un premier cas a été décrit en Grande-Bretagne, puis en peu de temps, des dizaines de cas supplémentaires ont suivi en Espagne, au Portugal, en Suède, aux États-Unis et au Canada. Le premier cas confirmé en France date du vendredi 20 mai 2022.
L’orthopoxvirus se transmet à l’être humain principalement à partir de divers animaux sauvages, rongeurs ou primates par exemple. La transmission de l’animal à l’homme peut se faire par morsure ou griffure, par la préparation de viande d’animaux de brousse infectés et pas suffisamment cuite avant d’être consommée, ainsi que par contact direct ou indirect avec des fluides corporels ou du matériel contaminé par le virus (litière contaminée).
La propagation secondaire par transmission interhumaine a été jusqu’à présent limitée. Elle s’effectue principalement par le contact cutané direct avec les liquides biologiques ou la lésion, et le contact indirect avec la lésion par des matériaux contaminés par le virus, par exemple par des vêtements, du linge de maison ou de la vaisselle contaminée. La transmission interhumaine peut se faire plus rarement par les gouttelettes respiratoires, qui ne peuvent généralement pas se déplacer à plus de quelques mètres, ce qui nécessite un contact prolongé en face à face.
Le virus pénètre ensuite dans l’organisme par une lésion de la peau (même non visible), des voies respiratoires ou des muqueuses.
La période d’incubation (intervalle s’écoulant entre l’infection et l’apparition des symptômes) varie de 5 à 21 jours.
Une personne infectée devient à son tour contagieuse dès l’apparition des premiers symptômes de la maladie. Lorsque les croûtes des lésions cutanées tombent, les personnes ne sont plus contagieuses.
Les symptômes ressemblent à ceux que l’on observait dans le passé chez les sujets atteints de variole, mais en moins grave. On divise habituellement la chronologie d’apparition des symptômes de la variole du singe en deux phases de survenue progressive une fois la période d’incubation passée :
Atteinte caractéristique de la paume des mains. Photo prise en 1997 lors d’une épidémie survenue en République Démocratique du Congo
La maladie dure généralement de 2 à 3 semaines.
La méthode diagnostique de référence est la PCR (Polymerase chain reaction). Afin que la technique soit optimale, il est nécessaire d’effectuer un prélèvement direct au niveau des lésions ou un écouvillonnage de leurs exsudats ou croûtes. Ces prélèvements sont conservés dans un tube sec et stérile et gardés au froid.
Les tests sérologiques et plasmatiques ne sont souvent pas concluants du fait de la faible durée de la virémie et du moment inadéquat du prélèvement des échantillons.
Le diagnostic différentiel est fait avec la variole, la varicelle, la rougeole, la gale, la syphilis, certaines infections bactériennes cutanées et les allergies médicamenteuses.
Varicelle : plus fréquente chez l’enfant en période de circulation active (crèche et milieu scolaire), elle est peu fréquente chez le sujet adulte. L’éruption cutanée évolue en plusieurs poussées. Les paumes des mains et les plantes des pieds sont épargnées.
Variole : se manifeste avec les mêmes signes cliniques, souvent plus sévères, elle est plus contagieuse et présente un taux de mortalité plus important. L’apparition d’une adénopathie au stade prodromique peut être un signe clinique évocateur d’orthopoxvirose simienne plutôt que de variole. Cette maladie a été éradiquée en 1980 grâce à la vaccination. Seule une analyse biologique permet de la différentier de la variole du singe.
La maladie se guérit la plupart du temps d’elle-même et son pronostic est habituellement favorable.
Une surinfection bactérienne de la peau et des poumons peut survenir.
Les formes graves s’observent essentiellement chez les enfants de bas âge, immunodéprimés et fortement exposés au virus. Chez ces sujets, l’infection peut s’étendre plus facilement et favoriser la survenue de complications telles que des surinfections bactériennes, pneumonie, septicémie, encéphalite et infection cornéennes à l’origine d’une cécité. Dans cette population fragile, le taux de mortalité peut atteindre 1 à 10 %.
Il n’existe pas de médicament spécifique contre la variole du singe. Le traitement est symptomatique, contre la fièvre, l’infection et la surinfection bactérienne.
Des cas de complications obstétricales ont été décrits : fausses couches précoces, variole du singe congénitale et mort fœtale in utero.
Ce qui caractérise les cas survenus en Europe et en Amérique depuis le 6 mai 2022 est l’apparition simultanée de plusieurs cas dans différents pays, sans lien avec un voyage en Afrique. Il semble que la transmission entre humains soit également devenue plus importante que ce que l’on observait dans le passé.
L’institut Pasteur a évalué en 2020 par modélisation mathématique que l’arrêt de la vaccination obligatoire au début des années 80 a eu comme conséquence la baisse progressive mais constante de l’immunité collective mondiale. Ainsi, d’un nombre moyen de cas causés par une personne infectée dans une population non vaccinée de 1,46 à 2,67 (Coefficient R), on est passé à un nombre moyen de cas par personne infectée inférieur à 1 dans une population vaccinée. La baisse progressive de l’immunité collective mondiale serait à l’origine d’une nouvelle augmentation du risque R repassant à nouveau au dessus de 1. L’importation de nouveaux cas venant d’Afrique et la propagation interhumaine en Europe et en Amérique seraient donc facilitées par ce fait.
La vaccination contre la variole donne une protection croisée d’environ 85 % contre le Monkeypox. La présence d’antécédents de vaccination antivariolique entraîne probablement une évolution atténuée de la maladie chez ces individus.
La vaccination contre la variole était obligatoire en France pour les enfants, jusqu’en 1979 puis a été ensuite interrompue. Aujourd’hui, la vaccination contre la variole est recommandée uniquement pour les personnes exposées à un risque élevé, comme le personnel de laboratoire et le personnel soignant qui travaille avec le virus de la variole ou les matériels apparentés.
La vaccination de personnel soignant exposé aux patients atteints de Monkeypox est recommandée par le vaccin de 3ème génération (vaccin vivant non réplicatif) Imvanex, autorisé en Europe depuis juillet 2013.
Tout cas suspect d’infection à Monkeypox doit être signalé sans délai à l’Agence régionale de santé, au même titre que les autres orthopoxviroses.
La COVID-19, maladie provoquée par le coronavirus (SARS-Cov-2) et la variole du singe, maladie provoquée par l’orthopoxvirus simien sont deux maladies qui n’ont aucun rapport l’une avec l’autre.
Leur comparaison est anecdotique et dénuée de tout sens, cependant, elle est rendue intéressante du fait de leur survenue l’une à la suite de l’autre et par la présence de certains points communs.
En cas d’apparition de symptômes évocateurs de la variole du singe (fièvre et éruption cutanée avec des vésicules), contactez votre médecin traitant. En attendant son avis il est recommandé de vous isoler afin d’éviter la transmission à des personnes saines.
https://phil.cdc.gov/default.aspx
https://www.formulaires.service-public.fr/
https://www.santepubliquefrance.fr/