« Mon enfant est hyperactif », « L’école me dit souvent que mon enfant est insupportable en classe et perturbe les autres », « Les professeurs n’arrêtent pas de se plaindre de mon enfant qui ne tient pas en place »…
Autant de phrases devenues banales, rapportées par des parents inquiets et conscients d’un problème présenté par leur enfant, sans véritablement réussir à le définir.
La frontière, comme souvent entre une « norme » d’un enfant vif, éveillé et remuant et la pathologie d’un trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), est ténue.
Éclairons cette frontière à la lumière des données de la neuroscience et de la médecine.
Les manuels diagnostics définissent le TDAH selon deux dimensions nécessairement associées :
Les symptômes d’inattention et d’hyperactivité doivent être présents depuis au moins 6 mois, et ce à un niveau indiquant une anomalie de l’adaptation de l’enfant à son environnement, ou étant inappropriés si on considère le développement général du sujet.
Ainsi il faut nécessairement envisager l’enfant dans son contexte, mais aussi en rapport avec ses propres acquisitions, essentiellement intellectuelles.
On regroupe sous le vocable des « troubles de l’attention » différentes notions subjectives mais facilement reconnaissables.
Les symptômes d’hyperactivité correspondent également à certaines situations :
Ce sont essentiellement les types de manifestations suivantes qu’on évoque dans le cadre des symptômes témoignant d’une impulsivité pathologique :
Il est nécessaire d’avoir retrouvé l’existence de certains symptômes de façon précoce. Certains des symptômes d’hyperactivité-impulsivité devant être remarqués avant l’âge de 7 ans.
Certains de ces symptômes doivent être présents et repérés dans au moins deux contextes de vie voire plus (école, famille, loisir..).
La détérioration des comportements sociaux, scolaires ou occupationnels doit être importante c’est-à-dire clairement identifiable.
Ce trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité représente le trouble psychique le plus fréquent chez l’enfant.
On accepte une prévalence (c’est-à-dire le nombre total de patient par rapport à la population totale) variable selon les auteurs, mais communément admise entre 7 et 9 %.
Il semble exister une assez forte prédominance masculine dans ce trouble puisque 3 garçons sont atteints pour une fille du même âge.
Cette affection est transculturelle, même si l’approche thérapeutique est variable selon les pays. Ainsi, 12 % des enfants nord-américains sont sous psychostimulants, ce qui représente une proportion inquiétante, soit de sur-diagnostic, soit de sur-traitement psychotropes, soit a contrario d’insuffisance diagnostique et/ou de différences thérapeutiques notables. En France, le nombre d’enfant sous traitement psychotrope de ce trouble serait de l’ordre de 1 % !
Plusieurs hypothèses causales de ce trouble, appelées « hypothèses étiopathogéniques » ont été avancées, sans qu’aucune ne soit véritablement avérée :
Celle-ci est basée sur l’efficacité avérée des psychostimulants (amphétamine et méthylphénidate) qui inhibent la recapture dopaminergique. Ce qui a pu un temps faire évoquer une analogie entre maladie de parkinson et TDAH.
En fait trop d’arguments rendent caduque cette hypothèse d’un déficit dopaminergique.
Il semblerait que les effets bénéfiques des psychostimulants sur le déficit d’attention seraient probablement dus à leur action inhibitrice de la recapture de la noradrénaline plutôt que de la dopamine.
Certaines zones cérébrales, dont le » locus coeruleus », joueraient un rôle activateur important du niveau d’attention avec principalement des neurones adrénergiques, c’est-à-dire utilisant la noradrénaline comme neurotransmetteur.
Mais les données en imagerie fonctionnelle et l’augmentation de l’attention chez les sujets sains contredisent cette hypothèse comme seul modèle étiopathogénique.
Néanmoins, à l’heure actuelle, Il n’y a pas de gène impliqué de manière majeure dans l’étiologie du TDAH, même si le gène le plus fortement associé au TDAH est celui qui code pour le récepteur dopaminergique D4.
Le TDAH est plus fréquent dans certaines familles.
On parle d’une héritabilité de 80 % (études de jumeaux), ce qui n’affirme pas le caractère génétique de ce trouble, mais plutôt une interaction manifeste entre l’environnement et le génome de l’enfant porteur de ce trouble.
En sa faveur, on retrouve des arguments neuro-anatomiques, basés sur l’imagerie cérébrale et le développement de l’épaisseur de la substance grise corticale chez l’enfant/adolescent, qui sont aujourd’hui avancés dans la genèse de ce trouble.
En effet, certains auteurs ont démontré l’existence d’un retard du développement cortical à l’âge de 3 ans, dans une proportion significative, chez des enfants souffrant de TDAH. Signalons tout de suite qu’il s’agit d’un simple retard ; le développement demeurant normal par la suite.
Encore une fois, cette seule anomalie prise isolément ne suffit pas à valider cette hypothèse causale.
De nombreux facteurs environnementaux semblent jouer un rôle dans la survenue du TDAH. Parmi ceux-ci, on a pu repérer un faible niveau économique des parents, un accouchement prématuré, un alcoolisme et tabagisme durant la grossesse.
Certaines caractéristiques maternelles sont également défavorables, sans que cela soit évidemment l’explication de ce trouble.
Simplement, le fait d’être une mère « trop jeune », immature psychologiquement, isolée socialement et familialement constitue un facteur de risque avéré.
Hélas, la maltraitance des enfants représente aussi un facteur de risque.
Enfin, l’excès de télévision entre un et trois ans se retrouve également avec une forte proportion chez ces enfants hyperactifs.
Considérons maintenant les traitements et les différentes prises en charge.
Tout d’abord, il est indéniable que certains traitement psychotropes ont une efficacité avérée, essentiellement des psychostimulants.
Il s’agit principalement du méthylphénidate, seul psychostimulant disponible en France.
La prescription de ce traitement se fait uniquement par des spécialistes en France, alors que celui-ci est accessible aux généralistes dans d’autres pays, aux USA en particulier.
Les actions sont rapides sur la symptomatologie chez la majorité des enfants atteints.
L’innocuité des psychostimulants est actuellement remise en cause avec peut-être des risques de mort subite ? Cela demeure à documenter et ne remet pas en cause la pertinence de ce groupe de médicament.
Il n’y a aucune diminution des risques de délinquance et de toxicomanie, hélas assez fréquents, chez les adolescents traités depuis leurs enfance.
Enfin, il existe un certain épuisement des bénéfices thérapeutiques de ces molécules au bout de quelques années de traitement psychostimulant, l’efficacité diminuant significativement.
MAIS…
Les symptômes associés voire des maladies ou des troubles connexes, fréquents dans le TDAH tels que l’anxiété, dépression, difficultés de fonctionnement social, ne sont pas améliorés par les psychostimulants.
Plutôt que les psychostimulants, les interventions comportementales (Thérapie Cognitivo-Comportementale) paraissent, elles par contre, bien plus efficaces sur ces symptômes, ce qui les rend indispensables lorsqu’on envisage la prise en charge de ce trouble.
L’aide psychosociale des parents est une nécessité, l’alliance systémique et collaborative entre la famille et les structures scolaires doit se réaliser afin d’éviter la pénalisation des conséquences de ce trouble.
Trouble d’étiopathogénie incertaine mais dont les recherches actuelles permettent d’envisager le caractère multidimensionnel de son étiopathogénie.
L’efficacité du méthylphénidate est certaine.
Il est indispensable de prendre en considération le « fonctionnement » social des enfants ainsi que le contexte familial.
Les psychostimulants doivent s’entendre en 2e intention, uniquement en cas de TDAH sévère et toujours en association avec une action psychothérapeutique et/ou socioéducative en direction de l’enfant et des parents.