Il y a quelques années encore, la pose d’un stérilet (ou dispositif intra-utérin ou système intra-utérin, DIU, SIU) à visée contraceptive chez une patiente nullipare (qui n’a jamais accouché) était contre-indiquée. Cette réticence était due à de nombreuses idées reçues, aussi bien chez les médecins qu’auprès des patientes.
L’évolution des mentalités ; la mise sur le marche de stérilets de petite taille ; la publication d’études portant sur cette catégorie de la population et la polémique sur la contraception hormonale de 3ème et de 4ème génération survenue en début d’année 2013 font qu’aujourd’hui la demande se fait de plus en plus grande.
Quelque soit l’évolution de cette pratique, il ne faut jamais oublier que toute méthode de contraception comporte des avantages, des inconvénients, des contre-indications et des effets secondaires rares mais parfois très graves.
Nous allons évoquer point par point les arguments du pour puis du contre l’utilisation du stérilet chez la nullipare.
L’efficacité d’une contraception s’évalue par l’indice de Pearl : c’est le pourcentage de grossesses « accidentelles » survenues en utilisant un mode de contraception donné pendant une année d’utilisation. L’unité de mesure de ce pourcentage est exprimée en « année femmes ».
Par exemple, un indice de Pearl à 1 correspond à la survenue d’une grossesse « accidentelle » en une année sur 100 femmes utilisatrices de la même méthode de contraception (pilule, stérilet etc.).
Ainsi, l’efficacité des stérilets au cuivre ou au lévonorgestrel (hormone progestative) est semblable, et reste supérieure à celle de la pilule contraceptive prise couramment mais avec quelques oublies possibles… Leur indice de Pearl est évalué à 1,1% en France alors que celui de la pilule oestroprogestative ou progestative seule est de 2,4%.
Ce taux est le même, quelque soit l’âge de l’utilisatrice, alors que pour la pilule, le taux d’échec est supérieur chez les utilisatrices âgées de moins de 21 ans du fait de plus fréquents oublies…
Le stérilet est donc dans la vraie vie, plus efficace que la pilule en terme de contraception proprement dite.
L’observance à un traitement correspond au respect par le patient de la prescription du médecin.
La prise quotidienne d’une pilule contraceptive est contraignante pour certaines femmes. Les oublies sont possibles, essentiellement au moment de l’instauration de cette méthode contraceptive et de surcroit chez les jeunes femmes.
On évalue en France que 2/3 des interruptions médicales de grossesses (IVG) sont dus à un échec de contraception (le 1/3 restant à l’absence de contraception). Parmi ces cas d’échec de contraception, 23% surviennent sous pilule et 17% sous préservatifs. Les grossesses survenues sous pilule sont dues à un oublie dans 60% des cas, à une maladie ou interaction médicamenteuse dans 18% des cas et sans cause reconnue dans les 22% restants.
On note ces dernières années une augmentation du recours répété aux IVG du fait de l’allongement du délai entre l’âge des premiers rapports sexuels (17,5 ans) et l’âge d’une première grossesse menée à terme (proche de 30 ans). La nécessité d’une contraception efficace et prolongée avant une première grossesse menée à terme est donc renforcée.
Un autre élément qui renforce la nécessité d’une contraception efficace et de longue durée est le fait que le recours à l’IVG est deux fois plus fréquent dans les tranches d’âge < 24 ans qu’à tout âge confondu.
On entend par taux d’abandon le taux de non continuation d’une méthode contraceptive donnée.
Il semble que ce taux soit plus élevé chez les jeunes femmes, toutes méthodes de contraception confondues.
Mais ce taux semble être inférieur pour le stérilet par rapport aux autres contraceptions dites de courte durée (pilule, anneau, patch). Pour les femmes âgées de moins de 20 ans il est évalué à respectivement pour le stérilet et les contraceptions de courte durée à 19% et 56% à 1 an puis à 34% et 64% à 2 ans.
Une information préalable donnée à ces jeunes femmes avant le choix d’une contraception augmente sans doute le taux d’adhésion à la méthode choisie.
Depuis un certain nombre années, et de façon plus accentuée depuis la polémique sur les contraceptions hormonales de 3ème et 4ème génération de début 2013, de plus en plus de femmes se tournent vers une contraception plus « naturelle ».
A tord ou à raison, les causes évoquées par le rejet d’une contraception hormonale sont la survenue d’un effet secondaire ; l’excès de contrainte liée à sa prise ; la volonté d’une contraception plus « naturelle ». Mais on peut aussi noter l’arrêt d’une contraception hormonale par la simple peur soulevée par la polémique médiatique de 2013 sans mesurer les conséquences négatives de l’arrêt de tout moyen de contraception…
Les femmes présentent une défiance accrue vis-à-vis des contraceptions hormonales, et notamment par rapport au risques de prise de poids ; des risques liés à l’association pilule-tabac (elles préfèrent arrêter la pilule plutôt que le tabac…) ; des risques théoriques d’une augmentation du cancer du sein ; des risques hypothétiques d’une baisse de la libido.
Le stérilet est donc perçu comme une contraception alternative plus « naturelle »…
Du fait de la nulliparité, le col utérin est plus rigide. L’orifice externe et l’orifice interne du col sont plus rétrécis. De ce fait, l’insertion du stérilet nécessite plus souvent le recours à une pince de Pozzi posée sur le col que chez les multipares. Les très jeunes femmes sont aussi plus souvent moins détendues pendant l’examen gynécologique. Toutes ces raisons expliquent un taux d’échec de la pose du stérilet plus élevé que chez la multipare.
La pose peut être pour ces mêmes raisons beaucoup plus douloureuse, avec un risque accru de survenue d’un malaise vagal parfois prolongé.
Il existe aujourd’hui une variété de stérilets à des tailles et diamètres différents, aussi bien au cuivre qu’au lévonorgestrel, mieux adaptés à l’anatomie d’une nullipare.
Contrairement à la contraception hormonale qui provoque un blocage de l’ovulation, le stérilet n’empêche pas l’ovulation, et donc la survenue d’une grossesse extra-utérine. C’est d’ailleurs le cas presqu’une fois sur deux lorsque survient une grossesse sur stérilet. Ce risque reste toutefois très modéré, estimé à 0,15% année femmes.
Il suffit de rester vigilent, d’effectuer un test de grossesse au moindre doute et de consulter son gynécologue en cas de positivité ou de signes évocateurs de GEU.
Le risque de perforation utérine au moment de la pose du stérilet ne semble pas augmenté chez la nullipare, bien que la taille de la cavité utérine soit moindre. Il est estimé à 1/1000.
Cette complication peut passer inaperçue et être découverte lors de la survenue d’une grossesse innatendue, ou lors de la surveillance échographique systématique du stérilet. Exceptionnellement, une perforation utérine peut avoir des conséquences infectieuses gravissimes avec un risque majeur de stérilité.
Les données de la littérature sont contradictoires concernant un risque plus élevé d’expulsion du stérilet comparativement aux multipares. Il est estimé entre 2 et 4% à 1 an après la pose.
Il est important d’informer la patiente de ce risque. L’expulsion du stérilet se manifeste le plus souvent par des contractions utérines expulsives associées à un saignement, mais peut aussi passer totalement inaperçue…
Il s’agit dans ce cas d’une infection de l’utérus (endométrite) et des trompes utérines (salpingite) attribuée à la pose ou à la présence du stérilet. Cette infection peut être liée à la présence d’une infection sexuellement transmissible (IST) présente au moment de la pose du stérilet ou survenant ultérieurement. Mais elle peut aussi être liée à la présence de micro-organismes présents dans la flore vaginale normale (bactéries, actinomycose).
Il semble cependant que le risque de survenue d’une IGH soit lié à la présence d’une IST et non pas à l’insertion du stérilet…
Ce risque est le plus important dans les 20 jours suivant la pose où il est estimé à 9,7/1000 année femmes. Il passe ensuite à 1,4/1000 année femmes.
Il est par conséquent conseillé au moindre doute, avant la pose d’un stérilet chez la nullipare, d’effectuer un prélèvement vaginal préalable avec la recherche de Chlamydiae trachomatis et de Neisseria gonorroeae.
Il est également conseillé d’utiliser des préservatifs en cas de relations sexuelles à risque.
Les sociétés savantes internationales et françaises sont aujourd’hui favorables à l’utilisation de la contraception intra-utérine par stérilet chez la nullipare.
Ce choix doit être minutieusement préparé, tant sur le plan médical que psychologique.
A chaque femme, sa contraception…
Congrès CNGOF 04 décembre 2014