Il est tout d’abord nécessaire de définir « l’addiction ». Cette notion est d’étymologie latine, « ad-dicere », renvoyant à l’esclavage et donc à la dépendance sous-tendue par une perte de liberté.
Durant le Moyen-Age, être « addicté » était une obligation, une condamnation par un tribunal, d’un débiteur qui ne pouvait pas rembourser sa dette financièrement, à payer son créancier par son travail, correspondant à une sorte de contrainte par corps. Le sujet « addicté » devenant en quelque sorte l’esclave de son créancier.
On retrouve ainsi une dimension essentielle de l’addiction qui est de « mettre son corps en jeu ».
Aujourd’hui, cette notion d’addiction peut être définie ainsi :
L’addiction est une conduite qui repose sur une envie répétée et irrépressible, en dépit de la motivation et des efforts du sujet pour s’y soustraire.
Le sujet se livre à son addiction (par exemple : utilisation d’une drogue ou participation à un jeu d’argent), malgré la conscience aiguë qu’il a – le plus souvent – d’abus et de perte de sa liberté d’action, ou de leur éventualité.
Enfin, il existe une dimension de péril du sujet « addict ».
La question est importante et mérite de s’y attarder. Faire le parallèle entre la dépendance à des toxiques avérés (drogues, alcool…) et les jeux vidéo ne semblent pas forcément évident.
Déjà, il n’existe aucune preuve neurobiologique permettant d’affirmer l’existence d’une addiction à Internet.
La dérégulation neuronale est impossible à démontrer dans les cas d’addiction sans substance (addiction comportementale) du fait que les études in vivo ne concernent que les modèles animaliers. Et la validation de l’addiction des rats de labo aux jeux vidéo pose problème !
Ensuite, la frontière entre la perte de contrôle véritable des impulsions (qui définit véritablement l’addiction) et une simple habitude envahissante (cf. TV ou téléphone) paraît souvent assez ténue.
La notion de mise en péril est à réévaluer dans le cadre des jeux vidéo, ainsi seuls les jeux « d’argent » sont aujourd’hui clairement reconnus comme une forme d’addiction, au sens médical du terme et relèvent donc d’une pathologie.
Le dernier point permettant d’émettre quelques réticences à évoquer une véritable addiction aux jeux vidéo concerne l’absence d’un syndrome de « sevrage » à l’arrêt de l’exposition (vacances) ainsi que la faiblesse des rechutes après le « sevrage ».
Bien sûr, nous ne pouvons pas conclure et trancher entre l’existence d’une véritable dépendance ou seulement des symptômes d’une affection sous-jacente et préexistante.
Il n’en demeure pas moins que le développement d’internet et de l’outil informatique impose cette réflexion devant l’émergence réelle et actuelle de comportements communément compris et admis comme conséquences « pathologiques » de l’usage de cet outil.
Lorsque le plaisir de jouer se transforme en besoin de jouer…
Lorsque le besoin de jouer devient plus fort que la volonté d’arrêter….
Il y a : DANGER.
Les jeux de rôle et réseau sont les jeux les plus sollicitants et sont plus souvent générateurs de dépendance.
Le joueur s’identifie totalement à son « avatar », qu’il crée à son image (l’avatar est souvent idéalisé et stéréotypé).
De cette façon, le réel se confond avec le virtuel, il y a perte des repères identitaires et souvent temporo-spatiaux également.
L’alternance jour-nuit, veille-sommeil, la notion de temporalité même s’effacent dans ces mondes virtuels, d’une vie par procuration, « avatardisée ».
Le nombre d’heures passées devant un jeu vidéo n’est pas un indicateur efficace pour démontrer qu’il y a addiction.
On parle d’addiction au jeu vidéo quand celui-ci devient le principal centre d’intérêt par rapport au sport, à la culture, aux copains, aux études et à la famille…
La dépendance se décline sous 2 formes :
Testez-vous pour évaluer votre degré de dépendance :
Tentons de mieux comprendre ce qui sous-tend, chez l’adolescent (puisqu’il s’agit le plus souvent d’une plainte parentale concernant son adolescent) l’addiction aux jeux vidéo.
Même si bien entendu, ces hypothèses psychopathologiques ne doivent pas être entendues comme universelles, constantes et applicables à chaque patient, on peut leur reconnaître une réelle cohérence.
Dans la plupart des cas, les jeunes essaient d’exprimer :
L’adolescent retrouve dans le langage, les codes, l’aspect communautaire du jeu vidéo en ligne, un moyen de distanciation par rapport à ses parents. Pour s’en convaincre, il suffit de faire l’effort de s’immerger dans le monde des « geek » pour ressentir facilement cette différence de codes et de langage !
Enfin, les campagnes publicitaires valorisent la consommation excessive et parfois le déni de la réalité. « Joue avec la vie », donne parfois un sentiment de toute maîtrise et de toute puissance, qui contraste avec l’appauvrissement et le décalage du joueur dépendant dans sa « vie réelle ».
Classiquement on peut retrouver comme conséquences :
Devant une suspicion d’addiction aux jeux vidéo, il est nécessaire d’avoir une démarche claire à visée diagnostique mais également à visée thérapeutique.
Il faut bien entendu avant tout que le joueur reconnaisse sa propre dépendance. Sans cette conscience du caractère pathologique, l’implication personnelle dans une démarche thérapeutique sera annulée.
Un diagnostic de dépendance doit être établi par un professionnel.
Il existe plusieurs techniques de prises en charge :
Elles permettent d’avoir un regard distancié sur son comportement et ainsi le modifier.
Partage d’expériences, repérage du mode d’interaction avec l’environnement, augmentation de l’estime de soi, apprentissage pour s’intégrer dans différents groupes et vivre en relation avec les autres.
Permettent une analyse des comportements et réalisent des hypothèses intrapsychiques « causales », tout en étant accompagné par un psychothérapeute.
Elle aidera les proches dans une démarche de soin. (Notion du « Patient désigné »).