Des déformations du pied peuvent être présentes à la naissance. Certaines sont de simples malpositions qui vont la plupart du temps évoluer de façon très favorable spontanément ou avec des traitements simples ; d’autres sont de véritables malformations qui vont nécessiter un traitement et une prise en charge précoces.
Les malpositions sont fréquentes et la plupart du temps bénignes. Elles sont dues à une mauvaise position du pied dans l’utérus.
Le métatarsus adductus (appelé autrefois métatarsus varus) est une déformation fréquente (3 % des naissances) où l’avant du pied va vers l’intérieur. Le reste du pied est normal. La décision de la mise en place d’un traitement dépend de la réductibilité du pied (capacité de réaligner l’avant du pied par rapport à l’arrière-pied) :
Test de réductibilité de métatarsus adductus
Un métatarsus varus très raide peut être en réalité un pied en Z (développé plus loin).
L’évolution est en général très favorable. Dans quelques cas il arrive que la déformation récidive et nécessite de nouveau des plâtres ou des attelles, mais cette déformation ne gêne presque jamais le chaussage et le recours à une intervention chirurgicale est extrêmement rare.
Métatarsus adductus
Dans le pied supinatus, l’avant du pied est en « supination », c’est-à-dire tourné vers le haut. Cette déformation est tout à fait bénigne et ne nécessite que rarement un traitement. Quelques manipulations simples par un kinésithérapeute seront prescrites si la déformation n’a pas disparu spontanément après 2 mois.
Dans le pied calcaneus (aussi appelé « pied talus »), le pied est en hyper-flexion dorsale : le pied est fixé vers le haut, il arrive même qu’il soit collé contre le tibia à la naissance. Cette déformation peut être impressionnante les premiers jours de vie, mais comme pour les autres malpositions, la déformation va s’améliorer spontanément une fois que le bébé ne sera plus « coincé » dans l’utérus. Si dans les premiers jours de vie il n’est pas possible de mettre la cheville vers le bas, on pourra prescrire quelques séances de manipulation douce par un kinésithérapeute, avec éventuellement un strapping ou des attelles dans les cas les plus sévères. Le recours à un orthopédiste pédiatre s’envisage à partir de 2 mois en cas d’échec, mais la plupart du temps la déformation a déjà disparu.
Les chevauchements d’orteils sont fréquents et ne nécessitent aucun traitement avant l’âge de la marche. Ils trouveront naturellement leur place dans les mois qui suivent l’acquisition de la marche. Si les orteils tardent à prendre leur place, un strapping pourra être mis en place pour faciliter le chaussage.
Par contre, le quintus varus supraductus est une malformation du cinquième orteil où le cinquième orteil va passer au-dessus du 4e orteil. Le traitement orthopédique par semelle ou strapping doit être tenté mais une intervention chirurgicale sera nécessaire si la gêne au chaussage devient trop importante.
Les malformations vont nécessiter une prise en charge spécialisée précoce, avec parfois la nécessité de réaliser des examens à la recherche d’autres malformations associées.
Le pied bot est fréquent (1 à 2 patients atteints sur mille naissances). Il est bilatéral dans la moitié des cas. 90 % des pieds bots sont « idiopathiques » (= sans cause retrouvée). La cause exacte du pied bot reste encore mal connue à l’heure actuelle. L’origine est probablement multi-factorielle. Une origine génétique est aussi probable car il existe des « familles à pieds bots ». Dans 10 % des cas, le pied bot est associé à une malformation ou à une anomalie chromosomique, neurologique ou musculaire. Des examens à la recherche de ces anomalies seront éventuellement demandés.
Cette déformation complexe serait due à une rotation du « bloc calcaneo-pédieux » (=ensemble du pied sauf l’os du talus). Il s’agit d’une véritable anomalie globale de développement du pied : le pied sera petit (1 voire 2 pointures de différence par rapport au pied sain), le mollet sera fin. Il existe même parfois une agénésie de certains muscles et certaines artères.
La déformation se produit au cours du développement du fœtus et peut être vue sur les échographies avant la naissance, le plus souvent lors de l’échographie du 2e trimestre. Le taux de dépistage est variable (40-80 %). En cas de suspicion de pied bot, il faudra alors que la famille soit adressée à un orthopédiste pédiatre pour une première prise de contact et être informée des moyens thérapeutiques éventuels. Il faut garder à l’esprit que c’est l’examen clinique du pied à la naissance qui permettra de poser un diagnostic final sur la déformation suspectée à l’échographie.
Dans le pied bot, le pied est déformé dans les trois plans de l’espace :
La classification de Dimeglio évalue la sévérité du pied. Seize points concernent la réductibilité (équin, varus, dérotation, adduction) et 4 points concernent la présence de sillons médial ou postérieur profonds, d’un creux (cavus) marqué, et d’une hypertonie globale (pied très rigide).
Le score final sur 20 points permet de classer les pieds en :
Le score est réévalué régulièrement au cours du traitement.
Pied bot varus équin
Le traitement doit être débuté dès les premiers jours de vie, au sein d’une équipe spécialisée dans la prise en charge des pieds bots. Initialement, le traitement sera avant tout orthopédique. Deux méthodes sont possibles, sans qu’aucune n’ait démontré à ce jour sa supériorité :
Plàtres de Ponseti
Quelle que soit la méthode, le taux d’intervention chirurgicale dépend de la sévérité initiale du pied et du sérieux des familles dans la rééducation et le port des attelles.
Dans la méthode de Ponseti, un allongement du tendon d’Achille à travers la peau (ténotomie) est souvent nécessaire pour finir de corriger le pied.
La réduction du pied est obtenue en quelques semaines, mais il va ensuite falloir consolider cette réduction. Le pied bot n’étant pas une simple malposition, le pied va se redéformer si on arrête le traitement dans les premières années de vie. Le traitement est intensif durant la première année, mais il va peu à peu s’alléger à partir de l’âge de la marche. Quand l’enfant marche, les attelles sont arrêtées la journée et sont portées la nuit jusqu’à l’âge de 3-4 ans. Par ailleurs des séances de rééducation seront prescrites et vont aussi s’alléger selon les progrès de l’enfant.
Dans le pied bot, certains muscles sont plus faibles que d’autres, et restent parfois trop faibles même après une rééducation intensive. Il arrive au cours de la croissance d’avoir à faire des interventions pour rééquilibrer le pied, mais ce sont des interventions « à la carte », adaptées au patient et au pied, qui sont beaucoup moins lourdes que la technique chirurgicale appelée « libération postéro-médiale » qui était utilisée avant l’avènement du traitement orthopédique précoce. Actuellement, quand le traitement est bien conduit, même en cas de pied bot très sévère, la libération postéro-médiale n’est nécessaire que dans 10 % des cas.
Le pied bot, même non traité, n’empêche pas la marche. Par contre si le pied n’est pas traité, le port de chaussures normales sera impossible.
En cas de traitement, l’immobilisation par les attelles, même portées nuit et jour, n’empêche pas l’acquisition de la marche. En réalité l’acquisition de la marche se fait par la maturation du cerveau.
Les enfants ayant un pied bot, en plus de marcher à l’âge normal, font aussi du sport comme les autres enfants. Aucun sport n’est contre-indiqué. Au contraire, le sport permet de renforcer les muscles du pied.
Dans la grande majorité des cas, les enfants portent des chaussures normales du commerce. En cas de pied bot unilatéral, il existe une différence de 1 voire 2 pointures entre les deux pieds.
Le pied convexe est une malformation rare du pied où la voûte plantaire, au lieu d’être creusée, va être convexe, donnant au pied un aspect « en piolet ». Le tendon d’Achille est rétracté et tire sur le talon en arrière (on parle « d’équin de l’arrière-pied »). Par contre l’avant du pied est vers le haut, mais la mobilité ne se fait pas dans la cheville mais au milieu du pied.
Dans un cas sur deux, le pied convexe est associé à d’autres troubles comme un problème neurologique ou musculaire, et d’autres examens seront éventuellement prescrits.
Le traitement est complexe et est une affaire de spécialistes. Le traitement orthopédique peut être tenté à la naissance (plâtres correcteurs, attelles, rééducation). En cas d’échec, un traitement chirurgical sera proposé à partir de l’âge de la marche.
Pied convexe
Le pied en Z est une déformation rare dont la cause n’est pas connue actuellement. Il peut être confondu avec le métatarsus adductus. L’avant du pied est aussi dirigé vers l’intérieur (adduction), mais l’arrière du pied va vers l’extérieur (valgus). La déformation sera complètement irréductible et résistante au traitement par plâtres. Le traitement est là aussi une affaire de spécialistes et peut débuter par un traitement orthopédique, avec une intervention chirurgicale vers 2-4 ans si il y a des douleurs lors du chaussage.
ANAES. Service des recommandations professionnelles. Masso-kinésithérapie et traitement orthopédique des déformations congénitales isolées du pied au cours des six premiers mois de la vie. Janvier 2004.
Dimeglio A, Bensahel H, Souchet PH, Mazeau PH, Bonnet F. Classification of clubfoot. J Pediatr Orthop B. 1995;4(2):129.
Dimeglio A, Bonnet F. Rééducation du pied bot varus équin. Encyclopédie médico-chirurgicale (Elsevier SAS, Paris) : Kinésithérapie – Médecine Physique – Réadaptation, 1997 ; 26-428-B-10 :1-12.